Un titre qui semblerait tout droit sorti du dernier blockbuster de science-fiction à la mode. Loin d’être un film à succès ! Mais bel et bien une prise de conscience collective, celle que le changement climatique bouleversera dans les prochaines décennies l’organisation de notre monde viticole. Si l’on ne peut se téléporter dans le temps, nous pouvons imaginer à quoi ressemblera le vignoble du futur ? Quel sera le viticulteur de demain face à ces divers enjeux et surtout quels seront les consommateurs dans un avenir prochain ? Au travers de trois portraits d’experts et de viticulteurs, le MAG 247 a tenté de se projeter, un véritable scénario d’anticipation.
Les vignobles français et leurs filières vont devoir s’adapter au changement climatique, qui devrait modifier sensiblement les conditions de production des vins, leurs caractéristiques organoleptiques et leurs marchés. Combiné à ces mutations sectorielles, il ne faut pas écarter également les évolutions des préoccupations de santé et d’environnement, les changements géopolitiques ou technologiques et les nouvelles conditions de consommation du vin. La viticulture française va devoir répondre à des « défis majeurs » dans les prochaines années. Si les vignerons sont habitués à se battre contre diverses maladies affectant la vigne et à affronter les aléas climatiques, ils sont confrontés depuis quelques années à des menaces grandissantes qui devraient s’intensifier dans les prochaines décennies : gel, pluies, grêle, maladies, ravageurs, sécheresse et incendies. Faisons tout de même preuve d’optimisme car les axes d’adaptation apparaissent nombreux…
Le vignoble du futur
Les problématiques de transition environnementale et de changement climatique sont des sujets du XXIe siècle, apparues au tout début des années 2000 pour la première et dans les années 2010 pour la seconde. Yves LEERS, Spécialiste des questions d’environnement, d’alimentation et de changement climatique, auteur de l’ouvrage Vin, le Grand bouleversement, quelle vigne pour quel climat ?, nous livre sans détour, études techniques et scientifiques à l’appui, sa vision à lui du vignoble du futur : « le changement climatique est bien là ! Depuis le début du XXe siècle, la température moyenne sur l’hexagone a progressé de +1,7 °C et cette progression a tendance à s’accélérer. Si le réchauffement atteint +2 °C vers 2050, il y a fort à parier que nombreuses seront les vignes qui auront du mal à survivre. Et les vins issus des vignes sauvées ne seront pas les mêmes qu’aujourd’hui alors
même qu’ils ont déjà changé. Et si le réchauffement atteint +3 °C, les dégâts seront irréversibles dans la viticulture comme pour le reste de l’agriculture, d’après les prévisions des climatologues du GIEC (Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat) ».
Yves Leers dresse un bilan factuel des modifications observables liées à cette hausse progressive des températures : « L’augmentation de la température enregistrée ces dernières décennies a déjà provoqué des changements visibles sur la physiologie de la vigne : avancement de sa phénologie (stades de croissance et de développement de la plante) et de la période de récolte (près de deux semaines en moyenne par rapport à la période avant 1980) ; augmentation du degré alcoolique ; baisse de l’acidité du raisin à la récolte ; modification des profils aromatiques et évolution du rendement dans certaines régions… ».
Les différents vignobles de France et notamment le vignoble de Bergerac-Duras, se sont inscrits depuis de nombreuses années dans cette profonde réflexion et mutation en expérimentant diverses pratiques et matériels végétaux. Pour le climatologue Yves Leers, le vignoble du futur devra s’appuyer sur trois piliers essentiels : « Le premier concerne la gestion du sol ; c’est une question fondamentale et elle constitue une urgence pour favoriser la résilience des vignobles, en combinant enherbement maîtrisé, apport de matière organique et aménagements anti-érosion… Le second repose sur la gestion de l’eau et surtout la préservation de cette ressource avec la mise en place de systèmes d’irrigation de précision. Le troisième, est le renouvellement et la diversification du matériel végétal : plantation de nouveaux cépages d’autres pays, variétés anciennes ressuscitées, des cépages hybrides résistants qui permettront la réduction de l’usage des pesticides (émetteurs de gaz à effet de serre), des variétés plus tardives, résistantes à la sécheresse ou à des températures plus élevées, produisant moins de sucres ou plus d’acidité. La piste des porte-greffes climato-compatibles est aussi une solution en cours d’expérimentation sur l’ensemble de l’hexagone ».
Il provient de l’hybridation naturelle entre un cépage « vitis vinifera » (la grande majorité des plants en France) et un plant de vigne dite « sauvage ». Ces plants sauvages proviennent majoritairement des régions peu propices à la culture de la vigne de part des conditions climatiques difficiles.
Il est une variété de vigne résistante au phylloxéra et adaptée au sol destiné à la plantation. Il constitue la partie enterrée du pied de vigne et sert de support au greffon.
Yves Leers
Vin, le grand bouleversement
Quelle vigne pour quel climat ?
Éditions Buchet • Castel
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Texte Bertrand Ballesta
Illustration Carte postale Leers