Mélomane érudit, après une carrière de diplomate, il fonde le Festival du Périgord noir, un des plus anciens et plus importants évènements de musique classique de Nouvelle-Aquitaine.
Une vocation pour l’art et la diplomatie
Né et élevé à Paris, Jean-Luc Soulé n’en est pas moins un périgourdin de cœur et de souche, issu d’une lignée de notamment, un préfet parmi ses grands-oncles). Ses racines périgourdines, très profondes, remontent à l’union, au 15e siècle, d’un soldat écossais et d’une périgourdine, au lendemain de la Guerre de Cent Ans. Enfant, puis étudiant, Jean-Luc passe tous les étés dans la maison de famille au bord de la Vézère à Montignac-Lascaux.
Diplôme de Sciences Po en poche, assorti d’un doctorat (DESS) de droit public, d’une licence en histoire de l’art et en lettres modernes, il commence une carrière internationale dans la diplomatie culturelle, comme attaché culturel, à Oman, à Paris puis à Budapest et Rome.
Un coup de cœur pour « le vin des rois, le roi des vins » (Tokaj) La Hongrie pourrait presque être une deuxième patrie pour ce citoyen du monde. Il reste six ans conseiller culturel à l’Ambassade, à la tête de l’Institut Français à Budapest, et parle le hongrois couramment. Séduit par la beauté du vignoble de Tokaj, il s’associe avec deux amis pour un pari fou : reconstituer un grand domaine d’avant-guerre, complètement démembré lors du collectivisme. Il faut pour cela racheter chaque petite parcelle en contactant les ayants droit, sachant que ceux-ci possèdent le plus souvent moins d’un hectare… La tâche est ardue mais le défi ne rebute pas les deux amis qui, une fois les 30 ha réunifiés, organisent la replantation avec des cépages soigneusement sélectionnés pour la production du précieux vin liquoreux. Le muscat à petit grain et la « feuille de tilleul » composeront les futurs assemblages aux côtés du traditionnel furmint (1).
« Je préfère les Tokaj entre 4 et 5 puttonyos », déclare Jean-Luc, grand amateur de liquoreux. Passionné, il explique le fabuleux terroir de Tokaj : « le sol volcanique donne cette acidité naturelle et essentielle à l’équilibre d’un grand liquoreux ». En 2000, il a organisé un voyage d’études en Hongrie, avec, au programme, la visite de plusieurs prestigieux domaines à Tokaj, dont celui de Disznóko, propriété d’Axa Millésime. Le « match retour » a eu lieu dans le vignoble bergeracois avec un accueil mémorable par le Consulat de la Vinée au Château de Monbazillac.
Retour aux racines périgourdines avec la création du Festival du Périgord noir
Après plusieurs années à l’étranger, l’appel du Périgord se fait sentir, mêlé à l’envie de mettre à profit son expérience pour le développement culturel d’un territoire qui lui est cher. « À l’époque, dit-il (2), l’offre en matière de festivals était très limitée, mis à part le Festival de Théâtre de Sarlat, le plus ancien en Dordogne ». Fort de son réseau dans l’univers musical, il propose la première édition du Festival du Périgord noir. C’est un succès, et, dès la troisième année, le festival est soutenu par l’État et la Région. L’été dernier a eu lieu la 42e édition de ce festival, qui a accueilli depuis ses débuts nombre de prodiges de la musique classique (Camille et Julie Berthollet, Renaud et Gautier Capuçon, Henri Demarquette, Adam Laloum, Edgar Moreau …). Le programme compte, en moyenne, une trentaine de concerts étalés sur trois semaines, avec une spécificité qui est chère à son président fondateur : l’Académie Baroque Internationale du Périgord Noir, dirigée par le chef basque franco-espagnol Iñaki Encina Oyón.
La promotion du Périgord à Paris
Dirigeant de Mécénat & Entreprise/MEC’ENE, où il met son expertise du mécénat en milieu culturel au service de grandes entreprises (et aussi de moins grandes), Jean-Luc Soulé préside depuis 2015 l’Association des Périgourdins de Paris, La Truffe. Par le passé, il s’agissait d’une « amicale », créée en 1881, qui proposait un réseau d’entraide. La Truffe compte aujourd’hui plus de 300 membres pouvant mettre à profit leur réseau d’influence dans leurs domaines respectifs pour la promotion du Périgord, tout particulièrement pour attirer des investisseurs sur le territoire.
La douceur d’un été en Périgord
Ses étés en famille sont immanquablement rythmés par les concerts du Festival (ce grand mélomane n’en manque aucun, soit plus de 1000 en 42 éditions !) qui s’égrènent dans les lieux enchanteurs de la vallée de la Vézère (Montignac-Lascaux, l’Abbaye de Saint-Amand-de-Coly, les églises de Saint-Léon-sur-Vézère, Auriac-du-Périgord…). Une escapade gourmande du côté de Trémolat, au Vieux Logis, a sa préférence, en souvenir de son ami disparu Bernard Giraudel, qui en fut longtemps l’âme. Là, en terrasse sous l’ombre des mûriers, il prend enfin le temps de savourer la douceur d’un été en Périgord, en dégustant la cuisine du chef Vincent Arnould, accompagnée d’une de ses cuvées préférées du vignoble bergeracois, un Montravel du Château Le Raz ou un Monbazillac du Domaine de l’Ancienne Cure.
1. Le Tokaj aszú (liquoreux ou « grains nobles »), tout comme le Monbazillac, se récolte lors de vendanges tardives, une fois installée la « pourriture noble » de la bactérie botrytis cinerea, en tries successives, et l’on évalue sa concentration en sucre en puttonyos.
2. NDLR – en 1983
Texte Marie-Pierre Tamagnon
Photo DR